Ma phobie

06/10/2018

Aujourd'hui je vais vous parler d'un sujet qui me tient à cœur ; ma/mes phobie(s).


Alors ce n'est pas très compatible avec ma future profession, me direz vous, mais je suis terrifiée par les insectes rampants surtout, mais aussi les petits parasites. Je n'ose même pas évoquer leur nom, tellement ça me dégoûte.

Au début, je pensais que ce n'était qu'un vague dégoût. Mais l'autre jour, j'ai fait une authentique crise d'angoisse, comme celles décrites dans le poly de psy. Et ça m'a fait un peu peur quand même.
Alors tout ce qui est parasitologie, je peux vous dire que les cours sont une véritable torture. Mais attendez donc que je me retrouve confrontée à eux en VRAI.


"Je marche sous la peau en y creusant des sillons et en y pondant mes oeufs à l'intérieur je suis je suis je suiiiiis ?..."

C'était une bête consultation de psoriasis à la base. La quinzième de la matinée. Et puis ça a dégénéré très vite.

« Je me gratte depuis une semaine avec ma femme, c'est bizarre non ? »
Mes antennes de trouillarde se dressent dans mon for intérieur. Gratte ? 2 personnes en même temps ?
La dermato, on sent qu'elle a de l'expérience, elle examine avec des gants, mais elle touche ses avant-bras nus avec sans pression. Elle dit avoir examiné des dizaines de patients à mains nues et n'avoir jamais rien attrapé.
On regarde les mains, elle dit que ce n'est pas très spécifique. Je me détends.
Elle demande à regarder le pipou de monsieur et paf ! Un joli nodule scabieux. pa-tho-gno-mo-nique de la gale.
Je fais un pas en arrière, je sens la chaleur qui monte lentement le long de mon cou et des sueurs froides en bas de mon dos. Garde ton calme.
Et allez qu'on le traite lui, toute sa progéniture, sa maison, ses voisins et le quartier.
On est jamais trop prudent.


''Je suis friand des follicules pileux et me complais en buvant le sang de mon hôte. Mes larves sont particulièrement dégoûtantes je suis je suis je suiiiiis ?"

C'était aux urgences, une très gentille dame bipolaire qui était visiblement sur un versant très joyeux en ce soir d'octobre. Elle est tombée en allant aux toilettes et s'est ouvert le crâne, il faut recoudre tout ça. Tant mieux, vous savez combien j'adore les points de suture.

Je prépare mon petit matos, je mets mes gants stériles, mon champ stérile et en avant, aiguille en main pour l'anesthésie.
Elle me sort alors calmement, presque en riant :
« Ah au fait, si vous voyez courir 2-3 petites bêtes dans mes cheveux c'est rien, c'est juste des poux ».
C'est rien c'est juste des poux ? C'EST RIEN C'EST JUSTE DES POUX ?
Je ferme les yeux pour reprendre une contenance.
Je les rouvre précautionneusement, et concentre mon regard sur la plaie ouverte. Je plonge dans les abîmes rougeoyants de la béance. Fixer la plaie, ne pas regarder autour. Fixer la plaie surtout, ne pas regarder le reste du cuir chevelu.
Je fais l'anesthésie et les 5 points sans voir le moindre petit morceau de patte de pou. Dieu merci, elle avait les cheveux noirs, donc ils restent difficile à discerner.
C'était une terrible épreuve, mais je suis terriblement fière d'avoir réussi à passer outre ma peur.


« Je suis l'un des plus terrible micro-organismes qui existe, je prive mon hôte de toute protection jusqu'à ce qu'il meure d'une bête angine je suis je suis je suis... »
Piquer un patient VIH, ça vous dit ? Quand vous avez une blessure au doigt en plus ? Cette petite panique qui vous étreint le ventre, si jamais vous faites le moindre faux mouvement, toute votre vie peut basculer en moins d'une seconde.
En même temps, on se sent terriblement désolé pour ce pauvre patient, alors je lui ai tenu la main, lui ai expliqué en quoi consiste le geste que je vais effectuer, que ça risque de piquer une peu, mais que c'est nécessaire, puis j'ai fait mon gaz du sang.
Et pour l'instant, je n'ai rien attrapé, si ce n'est un peu d'humanité.


Je me le répète, je vous le répète, il ne faut jamais montrer aux patients le moindre dégoût ou rejet à leur égard. Ils n'ont rien demandé, eux non plus.
Ils recherchent juste de l'aide, et si tout le monde les rejette, même les personnels de santé, qui donc restera-t-il pour leur sourire ?
Presque Docteur - Kinesine
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